« Comment me sentir légitime dans mon écriture? », est une question que je reçois souvent. Beaucoup de femmes, en effet, ont du mal à se sentir légitimes dans leur écriture. J’ai listé quelques raisons ici: parcours scolaire, complexe de la bonne élève, moindre valeur accordée à la parole des femmes ou encore champ littéraire dominé par les hommes blancs, qui sont encore majoritaires à la tête des grandes maisons d’édition et dans les jurys des récompenses prestigieuses. C’est le plafond de verre de la littérature.
Tu ES légitime
Pourtant, légitime, tu l’es, et on a besoin d’entendre ta voix. Ton histoire est unique, ton imagination aussi. Ton point de vue sur le monde est important. Mais, comme je le mentionne dans mon livre, sorti en mars dernier,
« [Les femmes] font face à des injustices systémiques (sexisme ordinaire, bienveillant, inégalités salariales, au sein du couple hétérosexuel, etc.) qui, forcément, auront un impact sur leur confiance en elles, en leur parole, en leur talent. »
Ecris ton histoire
Comme tu peux le voir, ton impression d’illégitimité ne vient pas de nulle part: elle prend racine à la fois dans ton parcours personnel (école, parents, ami-e-s), mais aussi dans le contexte socio-économique contemporain. Tu constates toutes ces choses, et il est normal ensuite que ça te freine, même inconsciemment. Alors, comment reprendre le contrôle sur tout cela? Voici 3 conseils pour toi. Car il n’y a aucune raison rationnelle à ce que ta voix compte moins que celle de quelqu’un d’autre.
1. Lire d’autres voix pour te sentir légitime
La lecture d’œuvres fortes de femmes, que ce soit des essais féministes, des romans, ou encore des témoignages (des récits sur les violences sexuelles comme La familia grande de Camille Kouchner, ou encore Le consentement de Vanessa Springora), va t’aider à prendre conscience de l’importance de ta voix. Si elles se sont fait entendre, pourquoi pas toi?
Mais attention, quand tu les lis, dis-toi bien qu’elles sont parties du même point que toi, au moins en ce qui concerne la possibilité de manquer de confiance en elles-mêmes et en leur parole (mais si tu es blanche, tu occupes déjà une place privilégiée par rapport à une femme racisée). Ainsi, elles aussi ont dû faire face à leurs blocages. Et pourtant, tu trouves leur voix légitime. Si elles y sont parvenues, alors toi aussi tu peux le faire.
2. Travailler ta posture d’auteure
La posture d’auteure est un concept qui a été beaucoup étudiée par l’écrivain et universitaire Jérôme Meizoz. Je l’ai évoquée sur ce blog plus d’une fois. Il s’agit de la manière dont tu te présentes en tant qu’auteure. Et tu es libre de d’adopter la posture qui te parle le plus. Tu peux écrire des récits autobiographiques et dire qu’ils le sont, tout comme tu peux prétendre que c’est de la fiction. Car, à partir du moment où tu publies, tu as le choix de présenter tes écrits comme tu le désires, tout comme tu as le choix, aussi, de prendre un pseudonyme.
Ainsi, tu peux de distancer, en tant que personne, de cette posture, et ainsi agir plus librement. Tu peux rester anonyme si tu le souhaites, à l’instar d’Elena Ferrante, écrivaine à succès dont on ignorait la véritable identité jusqu’à il y a peu.
3. Écrire
Au lieu de te poser des questions, lance-toi. C’est encore le meilleur moyen de prendre confiance en ta plume et en ta voix. Écris tes idées, mêmes les plus farfelues. Suis tes intuitions littéraires. Explore ton monde intérieur: tiens un journal. Raconte ce que tu vois. Écris tes colères, tes doutes, tes victoires. Tout cela t’appartient, et passer à côté serait bien triste. Aventure-toi dans l’inconnu, comme Rimbaud, poète que je chéris et qui aura le mot de la fin: